Conférence. La journaliste d'investigation Marie-Monique Robin dans le Vignoble de Nantes : "on n'est pas sûr que l'humanité survive"

Journaliste d'investigation et réalisatrice, Marie-Monique Robin donnera une conférence ce vendredi 11 mars à La Haye-Fouassière autour de son livre « La fabrique des pandémies ».

Marie-Monique Robin
Marie-Monique Robin en pleine action, lors d'un tournage à Mexico pour « La Fabrique des Pandémies ». Le film sera projeté pour la 1ère fois à l'UNESCO le 22 avril prochain. Il sera diffusé pour la 1ère fois à la télévision le 22 mai sur Ushuaïa TV notamment. ©(Photo : Kevin Vincent)
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Marie-Monique Robin, votre livre « La fabrique des pandémies », et le film du même nom que vous venez tout juste de finir de tourner, nous alerte sur le lien qu’il existe entre biodiversité et santé humaine, et nous offre un éclairage sur la pandémie à laquelle le monde est confronté depuis deux ans. C’est la Covid-19 qui vous a poussé à enquêter sur le sujet ?

J’ai commencé juste avant le premier confinement, en février 2020. J’avais lu un article dans le « New York Times » qui expliquait que c’était nous, les humains, qui avions fait la pandémie. J’ai voulu aller plus loin et chercher à comprendre.

J’ai donc interviewé une centaine de scientifiques – j’en ai gardé 62 dans mon livre – qui travaillent sur cette question des liens entre la biodiversité et l’émergence de maladies infectieuses. Ils tirent la sonnette d’alarme depuis des années en expliquant que si nous continuons à détruire les forêts primaires notamment, nous allons au-devant de graves problèmes sanitaires. Et ils avaient raison !

On parle préservation de l’environnement depuis longtemps. Tous les rapports, notamment le dernier du GIEC paru lundi 28 février, sont extrêmement alarmants. Pensez-vous que le fait de traiter le sujet de la biodiversité par le prisme de la santé humaine peut provoquer un électrochoc ?

Tout à fait. La problématique de la biodiversité – je rappelle qu’un million d’espèces animales et végétales sont menacées d’extinction sur 8 millions d’espèces identifiées – est largement sous-estimée, mais la question de la santé liée à la biodiversité, là, c’est carrément inconnu ! Alors que les scientifiques l’expliquent très bien : si nous continuons de détruire la biodiversité, nous allons notamment détruire le climat avec toutes les conséquences que ça a, mais nous allons aussi aller vers ce qu’ils appellent « une épidémie de pandémies ».

Sans biodiversité, il n’y a pas de santé possible. Il faut absolument revoir complètement nos modes de vie et nos modèles économiques. Il faut absolument réussir à reconnecter la santé des écosystèmes, des animaux sauvages et domestiques et la santé des humains. On sait exactement ce qu’il faut faire, mais pour y arriver, il faut une véritable volonté politique, et elle n’est clairement pas là ! Quand on voit le niveau de la campagne présidentielle, c’est inquiétant. Je ne sais pas de combien de rapports, tous plus alarmants les uns que les autres, il va falloir pour que l’avenir de la planète et les conditions de vie sur terre soient enfin pris au sérieux. 

Vous traitez de sujets environnementaux depuis 20 ans et regrettez plus que jamais que la prise de conscience ne soit pas à la hauteur des enjeux que vous décrivez. Cela fait-il naître en vous un sentiment de fatalité ?

J’ai coutume de dire qu’il est trop tard pour être pessimiste. On a devant nous des enjeux absolument énormes qui font – je ne l’aurais pas dit il y a 10 ans, mais je le dis maintenant – que l’on n’est pas sûr que l’humanité survive, et ce n’est pas rien du tout. Je pense égoïstement à mes enfants, et à travers eux à tous les jeunes qui auront à gérer ce grand bordel généralisé, qui va malheureusement s’accompagner de beaucoup de violences, et c’est ce qui me fait peur…

Vous êtes une journaliste connue et reconnue. Vous êtes décorée de la légion d’honneur, avez reçu le prestigieux Prix Albert Londres et une trentaine d’autres pour vos films d’investigation depuis 1989. Que représente pour vous ce métier, pourquoi l’exercez-vous ?

Mon seul moteur, c’est la défense des droits humains. J’ai fait des films sur des sujets très variés, aussi bien sur des femmes victimes de violences conjugales que sur des victimes de dictatures militaires en Amérique latine. Depuis une vingtaine d’années, je traite beaucoup de l’environnement, parce que ça fait aussi partie des droits fondamentaux que d’avoir des aliments sains, un air sain, de l’eau saine… Ça a l’air incroyable, mais il y a plein de pays du monde dans lesquels ce n’est pas le cas.

Et puis je trouve que c’est un métier extraordinaire puisque je passe mon temps à apprendre et transmettre. J’adore ça. Je suis une passeuse.

Pratique.

Conférence de Marie-Monique Robin sur « La fabrique des pandémies », vendredi 11 mars de 20 h à 23 h, salle Sèvria (3 Boulevard Verlynde) à La Haye-Fouassière. Entrée libre, mais réservation obligatoire sur : tinyurl.com/conference-robin ou par mail : [email protected]. Pass vaccinal obligatoire. L conférence sera précédée de la diffusion de son film « Guyane, une seule santé », et suivie d’une séance de dédicace de ses livres.

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